Une écriture poétique

Chansons

Louis Cabaret écrit les chansons de La Sauve à partir d’expériences personnelles et d’inspirations mythologiques. Les personnages sont à la fois mélancoliques et porteurs d’espoir. A travers eux, La Sauve nous plonge dans un univers singulier et nous invite à nous perdre un peu, le temps d’une chanson, le temps d’un concert.

LA RIVIÈRE

Les évidences s’effondraient, emportant le langage avec elles. On appelait ça la dépression. Je m’accrochais à ce qui passe sans rester, comme l’eau des rivières.
 

Le jour peut rester

Je ne creuserai plus

Ce qui meurt dans ma voix

C’est la même clarté

Et les bruits dans la rue

Que je ne comprends pas

Et jusqu’à la rivière

La rivière parlera

Soliloque solidaire

La rivière parlera

J’aurais voulu dire

Ce qu’il faut de tendresse

Pour passer les défenses

J’aurais voulu finir

Mais les mots qui me pressent

Me ramènent au silence

Et jusqu’à la rivière

La rivière parlera

Soliloque solidaire

La rivière parlera

J’ai voulu recueillir les instincts qui me cherchent

Traverser les rayures

Traverser les sécheresses

Et j’ai voulu prêter ma voix

Tendre mes pleurs comme autrefois

Tenter l’épure

Seulement l’épure ne résonne pas

Les phrases tombent en imposture

D’horizons froids

Et jusqu’à la rivière

La rivière parlera

Soliloque solidaire

La rivière parlera.

 

DANAÏDES

Celles que nous avons au fond de nous, qui nous font rechercher les mêmes fièvres et nous remplir des mêmes substances, pour parvenir, toujours, aux mêmes manques.

Tant me creuser par le ventre

De la vapeur dans la bouche

Toute la poussière quand je rentre

Et disparait quand j’y touche

L’érosion que j’appelle

Viendra-t-elle pour m’ancrer ?

Mets du plomb sous mon ciel

Pour les jours fatigués

Il faudra retenir

Quelque part s’accrocher

Arrêter de remplir

Des nombres percés

Je vous entends, tu pourras revenir

L’amour finira bien par t’arrêter

On pourra pas toujours tenir

Si tu tiens pas

Et ceux qui lâchent retournent au feu

Qui nous avale et c’est comme ça

Mais c’est à toi de faire mieux

Que tu l’acceptes ou pas

Il reviendra le temps de rendre les hommages

A tous ceux qui n’auront pas su me quitter

Et nous aurons peut-être un morceau de naufrage

A reprendre au passé.

FILS DU MATIN

Phaëton était le fils d’Appolon, mais nul ne voulait croire à son ascendance. On se moquait de lui. Adolescent, il se rendit sur les cimes où vivait le dieu. Il réclama que, pour preuve de sa paternité, Appolon lui confie le char qui tous les jours conduit le soleil d’est en ouest pour éclairer le monde. Appolon répondit que c’était trop dangereux et qu’il refusait. Phaëton insista.

Si j’attrape ta main

Regarde

Si j’attrape tes yeux

Regarde

Devenir à mon tour

Il me faut de l’amour

Pour pouvoir être mien

Pour pouvoir être deux

Et j’ouvrirai

Donne-le moi

Le chemin que tu prends

Et j’apprendrai

Et tu reconnaitras

Que je suis ton enfant

C’est pour qui ta confiance

Regarde

A me donner du sens

Regarde

Les signes qu’on me laisse

Ne savent plus parler

Sauras-tu t’approcher

Relever mes faiblesses

Et j’ouvrirai

Donne-le moi

Le chemin que tu prends

Je l’apprendrai

Et tu reconnaitras

Que je suis ton enfant

S’il faut mettre le feu

Regarde

J’enflammerai le peu

Regarde

Que tu veux m’accorder

Et tu diras je t’aime

Tu me diras je t’aime

Même s’il faut l’arracher

Et j’ouvrirai

Donne-le moi

Le chemin que tu prends

Je l’apprendrai

Et tu reconnaitras

Que je suis ton enfant

JE VOUS DIRAIS

Le premier amour et le premier chagrin qui l’accompagne, qui nous enseignent autant qu’ils nous dévastent.

Je laisse les mots de travers

Je laisse les grandes déclarations

En seul pivot de l’univers

Tourne l’orage comme un prénom

Je laisse les vrais comme les faux

Quand le cœur double et nous égare

A souffler fort sur nos lambeaux

Pour quelques flammes prises au hasard

Mais d’y revenir

Et cueillir les échos

Pour le plaisir

D’avoir le vent dans le dos

Je vous dirais que le désir s’élance

Comme on prend l’autre pour la vie

Comme on prend la vie pour la chance

Et que de larmes, on est rempli

Je vous dirais je m’en souviens

Je vous dirais la honte n’est pas si endurante

Que le désir quand il nous tient

Je vous dirais que ça nous hante  

Et que personne, vraiment, n’y comprend rien

Je vous dirais qu’on se croit venu quelque part

Que quelque part, comme c’est inépuisable

Je vous dirais que c’est trop tard

Et qu’on est tellement vulnérable

Quand l’élan nous revient

Je vous dirais comme il est sans détour

Et drôle à s’oublier

De voir que tout le monde autour

Ne s’est pas arrêté

Et qu’on est prêt pour de plus hauts chagrins

Et qu’on est prêt, maintenant, pour danser

Je laisse les mots de travers

Je laisse les grandes déclarations

En seul pivot de l’univers

Tourne l’orage comme un prénom

Je laisse les vrais comme les faux

Quand le cœur double et nous égare

A souffler fort sur nos lambeaux

Pour quelques flammes prises au hasard

Mais d’y revenir

Et cueillir les échos

Pour le plaisir

D’avoir le vent dans le dos

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